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  • Photo du rédacteurDebout Peuple Libre

De l'avenir en confiance à la décadence structurelle

A la suite de la présentation d’«un énième plan improbable, dit d’Accélération de la Transformation par ceux qui dirigent notre pays», Christian Emane Nna, vice-Président de ‘’Debout Peuple Libre’’ partage son regard sur «le mille-feuille politique et l’inopérance « et il nous propose une analyse chiffrée et comparée sur le «désastre» et le «déclin paradoxal» du Gabon.


Quand on aime son pays et qu’on a la chance de participer à sa gestion, on oriente opportunément ses actions vers la satisfaction des attentes de ses concitoyens. C’est dans cette obligation à élargir le champ des possibles pour chaque citoyen, que l’action publique est noble. Aussi, dans cet élan de bonne volonté, si l’on rencontre des obstacles et des échecs, ils doivent être considérés comme des phases d’apprentissage permettant de s’ajuster et de s’améliorer. Malheureusement, fidèles à leur logique, confiscatoire, illusoire et dilatoire, ceux qui dirigent notre pays sont aux antipodes de cette approche. Pour s’en convaincre, il suffit à chaque citoyen, d’ouvrir les yeux et les oreilles.


Le mille-feuille politique et l’inopérance


Comme tout le monde le sait, le Gabon est un pays riche mais avec un indice de développement humain en déphasage avec ses ressources et un niveau de vie en dessous de celui des pays comparables. Loin de l’objectivité et de la rationalité, la superposition des politiques publiques, guidée par l’ADN démagogique de leurs promoteurs, a davantage contribué à la confusion et à l’inopérance de l’action de l’État

Depuis 12 ans, ceux qui dirigent notre pays s’entretiennent dans l’illusion, glissant de « l’Avenir en confiance » à la décadence structurelle, avec pour matrice, le « Plan Stratégique Gabon Emergent », dont l’objectif prétendu est de conduire le Gabon à l’émergence en 2025, c’est-à-dire au même niveau de développement que la Turquie et la Serbie. A cette démagogie, on peut rajouter tous les autres plans y afférent, annoncés avec tambour et trompette, mais qui ont été aussi inefficaces les uns que les autres. Ces gadgets et ces maquettes pour lesquels l’essentiel des ressources de l’État ont été mobilisées et utilisées à mauvaise escient, demeurent sans le moindre impact visible et tangible dans la vie des Gabonais. En réalité, ils n’avaient pour objectif que le maquillage de l’échec cuisant des gouvernants.

En effet, lancés en 2009, le Plan Stratégique Gabon Émergent paré de ses principaux piliers, « le Gabon vert », « le Gabon industriel » et « le Gabon des services », dont la simple évocation semblait tenir lieu de réalisation pour ses promoteurs et ses zélateurs, demeure, 12 ans après, sans aucune mise en œuvre, conformément à son unique vocation de propagande politique.


L’Agence Nationale des Grands Travaux et toutes les autres agences publiques, créée pour servir de « bras armés à la politique de l’émergence du Gabon » et rattachées à la Présidence de la République en violation des textes en vigueur, ont davantage contribué au sous-développement et au déclassement du Gabon au cours de ces dix dernières années. D’ailleurs, elles ont toutes été dissoutes par leurs promoteurs, sans aucun bilan financier ni technique et cela au mépris de la loi. Ces agences ont finalement été des outils de captation, de dilapidation et de détournement des deniers publics.


La Politique Nationale de la Jeunesse élaborée en 2011 et qui avait pour objectif d’apporter des réponses aux difficultés de nos jeunes compatriotes, qui représentent 70% de la population de notre pays, est toujours en attente de sa mise en œuvre, dix ans après.


La Stratégie d’investissement humain lancée en 2013, issue de l’étude qui a coûté 10 milliards de FCFA aux contribuables avec pour objectif de concrétiser le Pacte Social, a été elle aussi, une gigantesque chimère. Assurément, les plus de 30% de nos compatriotes vivant sous le seuil de pauvreté, cibles principales de cette démarche, ne sont toujours pas sortis de la misère, bien au contraire, leur situation s’est aggravée.


La feuille de route pour « Accélérer la cadence et l’impact social » établie en 2014 ; le dispositif « Un Jeune, un métier » vendu à tout-va en 2016 pour les besoins de la campagne présidentielle ; le Plan de relance de l’économie élaboré en 2017 avec l’appui du FMI ; la feuille de route pour « Amplifier la dynamique de transformation économique et sociale » de 2019 ; le « Plan de Riposte et de Soutien Économique et Social » proposées en 2020 pour faire face aux conséquences de la Covid-19 ; toutes ces politiques sont restées inopérantes. En outre, on peut parier sans aucun risque que le « Plan d’Accélération de la Transformation » lancé il y a quelques jours, en janvier 2021, demeurera un concept creux. Il est important de préciser qu’il est le 6e plan en 7 ans et le 9e depuis 2009. Il est donc la preuve, s’il en fallait, de l’échec de tous les plans précédents.


Un désastre à 47 millions de FCFA de revenu par habitant sur dix ans


Notre pays est clairement à la déroute et rien ni personne ne peut raisonnablement objecter cette affirmation. En effet, entre 2009 et aujourd’hui, le Gabon a accumulé d’énormes ressources sans aucune réalisation substantielle. Plus précisément, depuis plus de dix ans, le budget de notre pays se situe autour de 3000 milliards de FCFA, pour un PIB d’environ 8000 milliards de FCFA en moyenne chaque année. On peut noter que le ratio entre la production de richesses de notre pays et ses ressources budgétaires, qui est de 2,66 en moyenne, ne présente pas un niveau élevé de productivité ni de compétitivité, en comparaison des standards des pays les plus performants. Ces derniers pointent des ratios chiffrés autour de 10, grâce à des choix d’investissements dans des domaines d’avenir à forte valeur ajoutée.


Dans tous les cas, tiré par la rente issue des matières premières, le PIB du Gabon reste tout de même d’un niveau suffisant pour garantir à chaque Gabonais un revenu intermédiaire de la tranche supérieure et leur permettant d’avoir une qualité de vie équivalente à celle des habitants des pays émergents. Mais dans les faits, les conditions de vie de nos compatriotes se dégradent de jour en jour. En dépit de ses ressources et de son potentiel, la situation du Gabon ressemble paradoxalement à celle des pays les plus pauvres de la planète et cela coûte très chers aux contribuables. Évalué et chiffré dans une approche structurelle, nous avons un désastre autour de 47 millions FCFA de revenu par habitant sur dix ans.


Pour être mieux édifié, il est intéressant d’établir des comparaisons avec d’autres revenus par habitant à l’échelle du monde. Le cumul du PIB par habitant du Gabon de 2009 à 2019 qui s’élève précisément à 46,830 millions de FCFA, représente 20 à 25 % de celui de certaines grandes puissances. Si l’on considère les dix années de référence, on peut noter que le PIB par habitant de la France est de l’ordre de 225,443 millions de FCFA et celui de l’Italie se situe à 189,466 millions de FCFA. Malheureusement, il n’y a pas de corollaire entre l’échelle de comparaison de ces différents revenus par habitants, notre qualité de vie et celle des habitants de ces deux pays qui sont respectivement, 6e et 8e puissance économique mondiale.


Loin de l’émergence, le déclin paradoxal et la corruption


Une autre analyse établissant le rapprochement entre le cumul du PIB par habitant du Gabon de 2009 à 2019 avec ceux des pays émergents que sont la Turquie et la Serbie, sur la même période, n’est pas sans intérêt. En effet, on peut constater que les revenus par habitant de ses deux pays sur les dix années de référence sont de 58,987 millions de FCFA pour la Turquie et 34,787 millions de FCFA pour la Serbie. Le revenu par habitant du Gabon qui est de 46,830 millions de FCFA se situe donc à la médiane de ceux de ces deux pays mais avec un écart considérable en termes de qualité de vie.

Pour preuve, au classement de l’Indice du développement humain en 2019, la Turquie se classait au 54e rang avec un score de 0,820. La Serbie dont le revenu par habitant est de 34,787 millions de FCFA au cumul des dix dernières années, était classée au 64e rang avec un score de 0,806, mieux que celui du Gabon qui, avec un revenu par habitant de 46,830 millions FCFA sur dix ans, soit plus de 12 millions de FCFA de plus, se situait au 115e rang avec un score de 0,702 et en recul de 5 places par rapport à 2018.


En outre, à l’indice de perception de la corruption de Transparency International en 2020, on peut relever que parallèlement, le niveau de corruption est en forte progression au Gabon. Notre pays est classé 129e dans le monde, avec un score de 30 points sur 100 et en recul de 6 places par rapport à 2019. Sur la même année, les pays de comparaison que sont la Turquie et la Serbie sont respectivement classés 86e avec 40 points sur 100 et 94e avec 38 points sur 100. La triangulation de ces données établit indubitablement que la bonne gouvernance reste le principal levier de développement d’un pays.


La volonté de réussir est la clé du progrès


Gouverner, diriger ou porter le leadership est indéniablement une responsabilité plus qu’un privilège. Cela nécessite assurément du sacrifice, de l’enthousiasme et du talent. Être leader et conduire une organisation ou une nation exige d’avoir des capacités à transcender les intérêts particuliers, à traduire la diversité en unité et à transformer les aspirations et les idées en dynamique collective au service de tous. C’est à partir de ces éléments que l’on construit la légitimé et que l’on suscite la mobilisation, l’implication, l’appropriation et l’engagement de chaque partie prenante.


Définitivement, on ne transforme pas un pays en créant chaque jour un nouveau gadget, en contemplant des maquettes dans des vitrines et en annonçant à intervalles réguliers des concepts creux. La conduite des affaires publiques, appelle le sens de l’État, du devoir et de l’histoire. C’est du dévouement, de la passion et de la bonne volonté de celles et ceux à qui le peuple confie sa destinée que naissent le développement et le rayonnement d’un pays. La grandeur du Gabon et sa place dans le concert des nations ne procéderont donc pas du maquillage et de la cosmétique publique. Mieux qu’un énième plan improbable, dit « d’Accélération de la Transformation » par ceux qui dirigent notre pays, la volonté de réussir reste la clé du progrès.


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